PGA du Canada

Un siècle de souvenirs

Gord de Laat (second from left) engaged with many golf icons during his career, including Sam Snead (far right), winner of 82 PGA Tour events.
Mise à jour: Gordon de Laat est décédé à l’âge de 100 ans en novembre 2017

L’aîné des professionnels de golf du Canada, Gordon de Laat, a 100 ans cette année, un jalon aussi remarquable que les légendes qu’il a côtoyées.

Lentement mais sûrement, à force de travail assidu, le jeune immigrant a grimpé les échelons du club. Il a appris le jeu, puis les règles, et comment se conduire avec dignité en tout temps.Le 1er juillet est une date historique, non seulement pour le Canada, mais aussi pour Gordon de Laat. C’est en effet ce jour-là, en 1927, que le garçon de 10 ans d’origine hollandaise s’est pointé au Lambton Golf and Country Club de Toronto dans l’espoir d’y gagner quelques sous. Les 20 cents qu’il ramena à la maison furent son premier salaire au golf, pour avoir porté le sac d’un membre sur neuf trous, tous les autres enfants étant partis célébrer le 60e anniversaire de la Confédération.

À l’approche de son centième anniversaire, le 11 avril, l’aîné des professionnels de golf au Canada incarne toujours ces mêmes qualités. Amical et courtois, il ne se fait pas prier pour régaler ses interlocuteurs d’anecdotes, et il en a à profusion.

Il se souvient de ses journées passées à récupérer les balles de George S. Lyon sur le terrain d’exercice de Lambton; de sa rencontre avec Bobby Jones au Peachtree Golf Club d’Atlanta; d’avoir regardé Ben Hogan claquer des balles pendant une heure et demie en 1960; d’avoir joué avec Sam Snead, avec Bob Hope et tant d’autres personnages emblématiques qu’il a côtoyés au fil des ans.

Et pas seulement au golf. De Laat a aussi patiné aux entraînements des Maple Leafs de Toronto pendant quelques années, jouant aux côtés de Punch Imlach et Stafford Smythe, et a fait partie en 1943 de l’équipe de championnat de l’Aurora Army au sein de l’Ontario Hockey Association. À 5 pieds 7 pouces, l’ailier droit de 145 livres s’avérait un tireur rapide. Meilleur buteur de l’équipe pendant quatre saisons, il a déjà compté neuf buts en un match.

Mais le golf a toujours été sa vértable passion. Écoutant attentivement les professionnels du club recrutés en Écosse à l’époque, il a absorbé tout ce qu’ils disaient. « Ils nous enseignaient le jeu et n’entendaient pas à rire, raconte de Laat. “Fais ça comme ça ou va-t-en!” »

Ayant gradué de cadet B à cadet A grâce à son empressement et à sa ténacité, le jeune homme devient le protégé du pro en titre de Lambton, Willie Lamb. Élève de Percy Barrett, lui-même formé par Harry Vardon, Lamb apprend à de Laat tous les secrets de l’entretien des bâtons et de l’enseignement du golf. Si bien que celui-ci est nommé adjoint junior de Lamb et continue d’améliorer son jeu.

Plus ancien membre actif de la PGA du Canada, De Laat n’avait pas le talent inné de ses homologues, mais il n’a jamais cessé de s’exercer, ce qui lui a permis de maîtriser un jeu court exceptionnel et créatif. C’est ainsi qu’il remporte le championnat des pros adjoints de la région de Toronto en 1938, puis obtient une place au premier de ses 15 Omniums canadiens en 1941.

Décidé à tracer sa propre voie, de Laat quitte Lambton peu après. Il fait un bref stage d’adjoint au Lakeview Golf Club avant de s’éloigner de l’industrie golfique durant la Seconde Guerre mondiale. Le Championnat en partie par trous du Trophée Millar 1944 marque un point tournant de sa carrière.

Rassemblant toutes ses économies pour s’inscrire, de Laat est le moins coté des concurrents, et de loin. Pourtant, il défait un à un les meilleurs joueurs qu’il affronte, ce qui lui vaut le surnom de « Tueur de géants », jusqu’à la finale qu’il perd 6 et 4 contre son ami Bill Kerr.

Cette course au Trophée Millar le fait remarquer et on lui offre le poste de professionnel en titre au Pine Point Golf Club. Il y travaillera trois saisons. En 1948, le Weston Golf and Country Club voisin lui demande de remplacer le pro en titre Bob Burns décédé. C’est là que de Laat poursuivra sa carrière de professionnel pendant 30 ans.

De Laat s’avère le pro de club par excellence, toujours respectueux du sport et des membres. Ce qui lui vaut de nombreux amis, comme Arnold Palmer, gagnant de l’Omnium canadien 1955 à Weston, et Charlie Sifford, premier Afro-Américain sur le Circuit de la PGA. De Laat est assez bon pour jouer avec eux, mais il n’atteint pas tout à fait la distance qu’il faut pour accéder au circuit et les battre.

Gord da Laat (second from left) engaged with many golf icons during his career, including Sam Snead (far right), winner of 82 PGA TOUR events

Gordon de Laat (2e à g.) a côtoyé plusieurs icônes du golf pendant sa longue carrière, dont Sam Snead (1er à dr.), vainqueur de 82 tournois sur le Circuit de la PGA.

Il a d’autres projets en tête, cependant : il rêve d’établir son propre club. Enfin, 23 ans après avoir versé un acompte de 15 000 $ pour un terrain à Caledon, Ontario – le lundi suivant la finale de l’Omnium 1955 où il a joué les quatre rondes –, le pro de club vétéran fonde le Mayfield Golf Club en 1978.

« J’avais neuf enfants et il fallait que je les tienne occupés, alors on a construit un parcours de golf, dit-il en riant. On a commencé le 1er avril, travaillant en équipes avec l’aide des fermiers du coin. On a remué la terre et aménagé un neuf trous dès la première année. »

Enfant d’immigrants démunis, de Laat n’avait pas accès au golf. Le club Mayfield, qui s’est agrandi à 27 trous en 2007, il l’a toujours destiné à un usage public.

Trois de ses fils – Christopher, Gregory et Paul – se chargent maintenant du quotidien de l’entreprise familiale, mais leur papa aime encore socialiser au pavillon et il assiste parfois aux réunions de gestion… quand il n’est pas à s’exercer sur le terrain.

Ses enfants disent qu’il n’a jamais cessé de bouger et de se tenir occupé, ce qui l’a sans doute aidé à rester en si bonne santé. Ce n’est qu’un de ses nombreux accomplissements depuis son arrivée au quai 21 du port de Halifax en 1924.

Gordon de Laat a donné près de 90 ans de service au golf dans ce pays. Quand on lui demande ce que le golf et le Canada lui ont donné, il répond simplement : « Un mode de vie. »


Spring_2017_Cover_FRCet article a été publié dans l’édition de avril 2017 du magazine Golf Canada. Pour lire l’article dans le format original, cliquez sur l’image à la gauche.