L’illustre Sandra Post, qui siège au Temple de la renommée du golf canadien, célèbre non seulement son anniversaire cette semaine, mais elle fête aussi le 50e de sa première victoire en LPGA.
Reflétant sur sa longue liste de réalisations, qui comprend un trophée Lou Marsh à titre d’athlète par excellence au Canada, le prix de la Presse canadienne comme athlète féminine de l’année au pays – à deux reprises – et l’honneur d’être décorée de l’Ordre du Canada, Post croit que d’avoir gagné le Championnat de la LPGA, un tournoi majeur à sa première tentative, restera le moment qui définit le mieux l’héritage qu’elle lègue sur le terrain.
Mais après déjà 50 ans depuis ce gain, Post est consciente qu’elle a une plus grande mission hors du terrain, soit d’aider à promouvoir le golf auprès des femmes et de rehausser leur statut dans le sport.
« Ce n’était pas qu’à propos du sport, » dit-elle. « Je savais qu’il y avait d’autres enjeux. Je l’ai réalisé rapidement. »
Post raconte qu’elle ne saisissait pas l’énormité, à l’époque, de ce que signifiait cette victoire dans un tournoi majeur, avant que ne se pointe cet anniversaire. Elle a remporté quelques tournois plus tard en carrière qui sont devenus des majors depuis coup (Post a gagné le tournoi ANA Inspiration à deux reprises lorsqu’il était connu sous le nom de Colgate-Dinah Shore Winner’s Circle, mais n’était pas encore un tournoi majeur). Elle ne réalisait pas encore que ce sont les majors qui définissent une carrière.
« Ce sont des moments qui demeurent en toi, » affirme-t-elle. « Qu’on soit championne de l’Omnium américain, ou championne de la LPGA, c’est vraiment fabuleux. »
Post n’avait que vingt ans lorsqu’elle s’est présentée au départ du Championnat de la LPGA de 1968 à Pleasant Valley Country Club, situé à environ une heure de Boston.
Elle a conclu les 72 trous à deux coups au-dessus de la normale, à égalité avec son idole de l’époque Kathy Whitworth, elle qui était déjà signataire de 27 gains en LPGA (et qui en enfila 88 en carrière, un record). Ce fut une ronde de prolongation de 18 trous qui trancha le lendemain en faveur de la championne.
Post se rappelle avoir téléphoné à son père à Toronto pour lui annoncer qu’il y aurait prolongation le lundi et ce dernier obtint un siège dans le dernier avion du dimanche pour Boston en compagnie des journalistes qui venait de couvrir la victoire de Bob Charles à l’Omnium canadien tenu au club St George’s.
Post n’arriva pas à trouver le sommeil cette nuit-là et sauta dans sa voiture pour aller chercher son père à l’aéroport de Boston. Les journalistes présents n’en croyaient pas leurs yeux de voir que Sandra Post, qui disputait la ronde la plus importante de sa vie le lendemain, s’était farci deux heures de route aller-retour, à minuit. Mais cette dernière dit simplement qu’elle n’avait rien de mieux à faire à l’aube de la supplémentaire.
Lors du repas qui eut lieu plus tôt en soirée, elle se remémore être assise aux côtés de Mickey Wright (membre du Temple de la renommée mondial du golf et gagnante à 82 reprises sur le circuit de la LPGA) et Susie Berning (gagnante de quatre tournois majeurs de la LPGA) et leur demanda ce qu’elle devait faire pour vaincre Whitworth le lendemain.
« Je me souviens de Susie qui me disait d’y mettre toute la gomme, dès le départ. Et je lui dis, quoi, vraiment ? OK alors ! Je n’oublierai jamais cet échange, » raconte Post. « Je n’avais pas de stratégie particulière, mais j’étais excitée au possible d’être assurée de terminer en deuxième position du Championnat de la LPGA, » s’exclame-t-elle en riant.
« Une énorme foule était sur place pour assister à ce duel rappelant David contre Goliath, » dit Post. Elle se rappelle du cadet, qui avait à peine 14 ans, et que le total de leurs âges éclipsait à peine celui de Whitworth — elle qui avait 29 ans à l’époque.
Post débuta la journée en inscrivant trois oiselets consécutifs, mais Whitworth inscrit un aigle et un oiselet lors des quatre premiers tous et les deux golfeuses étaient toujours nez à nez.
« J’ai jeté un coup d’œil à Susie qui était sur la colline près du 4e trou et je lui ai dit : «c’est tout ce que j’ai ! Et maintenant, qu’est-ce je fais ? », se rappelle Post. « Elle a simplement levé les bras au ciel. »
Alors que la journée suivait son cours, il en devint évident que Post allait être sacrée championne, puisqu’elle jouissait à ce point d’une avance de cinq coups.
Mais Wright était déjà l’une des plus grandes championnes de la LPGA : il était hors de question pour Post de la prendre à la légère. Toutefois, au fur et à mesure que le match progressait, il était clair que c’est Post qui allait l’emporter.
Post a calé une approche de 90 verges au 15e trou, une normale quatre, pour réussir l’oiselet et se forger une avance de sept coups. Lorsqu’elles en furent au 17e, Whitworth décocha la balle dans les arbres à partir des jalons et ne put s’en extirper. Elle inscrit un quadruple boguey et Post vogua vers la victoire avec sept coups d’avance, terminant à -5, tandis que Whitworth y allait d’un score final de deux au-dessus de la normale.
Post enleva le titre et une « énorme » bourse de 3 000 $ US, la plus grosse somme qu’elle avait remportée jusqu’alors. Elle dit avoir toujours une copie du chèque en sa possession !
« J’ai aussi reçu un boni de Spalding. J’ai sauté dans ma voiture et pris la route de Baltimore, où se déroulait le tournoi suivant, avec le sentiment d’être riche, » raconte-t-elle en s’esclaffant.
En reflétant sur cette victoire d’il y a déjà 50 ans, Post affirme qu’elle a une tonne de bons souvenirs sur le terrain, mais que c’est à l’extérieur du parcours qu’elle a vraiment appris où se trouvait sa place dans le monde.
Elle sait que les femmes jouaient alors pour les bourses et qu’elles avaient besoin de cet argent pour joindre les deux bouts, mais, aussi, elle relate que toutes les golfeuses qui évoluaient sur le circuit de la LPGA à l’époque désiraient élever le statut des femmes dans le sport et qu’elles étaient toutes bien conscientes de ce rôle.
Post affirme aussi que le vote tenu pour l’attribution du Trophée Lou Marsh en 1968 fut un point tournant de sa réalisation qu’elle devait en faire plus pour promouvoir l’avancement des femmes dans le sport professionnel. Elle termina en cinquième place du scrutin cette année-là.
« J’ai pris cela très au sérieux. Je venais de remporter le titre de Recrue par excellence, j’avais gagné un tournoi majeur, et j’étais devenue la première femme canadienne à vraiment percer dans le monde du golf professionnel. Le fait d’être une femme qui excelle dans un sport professionnel… et de me classer 5e au scrutin… je n’ai jamais cru que ce n’était pas juste, mais cela m’a fait réaliser que j’avais encore du boulot à accomplir, » avoue-t-elle. « Je me devais de faire passer le message à notre pays. »
Post dit que c’était un honneur pour elle de passer le flambeau du golf professionnel canadien à Gail Graham et à Dawn Coe-Jones, puis de les voir à leur tour faire de même vers Lorie Kane et A.J. Eathorn qui l’ont légué à Brooke Henderson et à Alena Sharp.
Cela la réjouit de constater les progrès effectués dans le golf féminin, notamment en ce qui a trait aux bourses d’études et à la hausse de la cagnotte lors des tournois de la LPGA. Elle n’a aucun doute à ce que Brooke Henderson passe le flambeau à son tour dans un avenir pas trop lointain, compte tenu du fait que le peloton de la LPGA semble croître en talent, tout en rajeunissant, d’une année à l’autre.
« J’observe les enjeux sociaux et je vois tout ce qu’on a réussi à accomplir. Absolument. Il reste beaucoup de travail à faire au sujet des disparités qui existent au niveau des bourses, entre autres, mais j’ai généralement tendance à voir le côté positif, » dit-elle.
Âgée de 70 ans, Post est toujours aussi vive d’esprit. Sa victoire acquise il y a maintenant un demi-siècle fut un point tournant pour le golf féminin au Canada et a pavé la voie à de nombreuses athlètes. Même si elle n’était qu’âgée d’un « jeune 20 ans » à l’époque où elle entra dans le cercle des vainqueurs, elle affirme que de faire partie d’un tel groupe de femmes est une expérience qu’elle n’oubliera jamais.
« Lorsque j’y repense, j’ai tant d’admiration pour celles qui ont fondé la LPGA et ce qu’elles ont accompli. Tu parles de pionnières à l’état pur, pas seulement au golf, mais pour la condition féminine. Pour aider à faire bouger l’aiguille au profit des femmes, » dit-elle. « Je ne changerais pas l’époque où j’ai vécu cela pour toute autre. »